Affaire Faux-thon : Monsieur Jérôme Anoh (DG de Inter Océan) recadre le député Assalé Tiémoko

Affaire Faux-thon : Monsieur Jérôme Anoh (mareyeur ivoirien) recadre le député Assalé Tiémoko

Votre commentaire sur la sortie du Député Maire Assalé Tiémoko sur la crise dans la filière faux-thon   

J’ai suivi à la lettre la sortie du député maire monsieur Assalé Tiémoko pour qui j’ai beaucoup de respect. Mais il y a eu des sorties de route tout au long de son analyse. Il y a plusieurs éléments qui ne sont pas conforment à la matérialité des faits dans ses propos. Pour dire vrai, les bateaux ne viennent pas pour les mareyeurs. Ils viennent pour les usines, pour le transbordement dans les cargos qui sont ensuite envoyés dans les pays européens et les Etats Unis d’Amérique. Ils ne viennent donc pas pour les mareyeurs. Par contre ce qui se passe, c’est qu’aujourd’hui, la Côte d’Ivoire est le plus grand port thonier d’Afrique. Ce sont les usiniers qui commandent le poisson ou bien l’extérieur, en parlant de transbordement. Il est arrivé un temps, il y a des gens comme Kassogué Daouda dit Moumouni de l’entreprise SDMG, que le député Assalé a cité dans sa vidéo, qui proposent un prix très élevé aux armateurs au détriment des usiniers. Et, alors que le poisson bord navire se vendait à 600 ou 700 francs CFA selon les normes internationales, ce dernier va proposer un prix de 1000 ou 1100 francs CFA aux armateurs qui, étant des commerçants, se tournent vers le plus offrant.

Ainsi donc, les armateurs, bien que venus au compte des usines, déclarent un faux tonnage à ces usines. Par exemple, l’armateur peut arriver avec 1000 tonnes et déclarer 200 tonnes aux usines. Ils vendent donc le minimum aux usines au prix fixé à l’international et le maximum aux mareyeurs qui proposent des prix plus élevés. Ce qui porte préjudice non seulement aux usines qui emploient des milliers d’Ivoiriens mais aussi aux consommateurs ivoiriens. Il faut donc qu’on diminue le prix des denrées pour que tous les Ivoiriens puissent se nourrir. C’est pour cela que nous avons soutenu le décret de plafonnement pris par le chef de l’Etat en 2021. Malheureusement les gens ne nous ont pas écouté. Ils ont préféré s’aligner sur le mensonge de Kassogué Daouda et aujourd’hui, voilà où nous en sommes.

Vos rapports avec Monsieur Kassogué Daouda

J’ai travaillé avec Kassogué Daouda pendant plus de dix ans. Nous nous sommes séparés à cause justement de son attitude au détriment des nationaux en surenchérissant sur le prix du faux thon destiné à la consommation locale. Il avait des marchés, mais le comportement de Kassogué a entrainé sa faillite. Il n’avait donc plus rien pour travailler et aussi sur le plan financier. C’est moi ANOH Jérôme, Gérant de la société Inter Océan, qui le soutenait pendant ce temps de disette. Mais après, il s’est associé à d’autres personnes pour envoyer des messages à mes partenaires coréens pour leur proposer des prix d’achat supérieurs (entre 700 et 850) au lieu de 400 voire 500 francs CFA que je leur payais. Face à leurs intérêts, les Coréens ont trahi les engagements qui nous liaient pour s’associer à Moumouni Kassogué et sa bande qui leur proposent des prix plus élevés. Aujourd’hui, ce sont les bateaux sur lesquels je travaillais avant que Moumouni Kassogué exploite.

Pas d’Ivoirien dans le secteur ?

Monsieur Assalé Tiémoko ne dit pas vrai parce que, si j’ai bonne mémoire, lui et moi nous nous connaissons depuis près de vingt (20) ans. Il sait que j’étais le premier mareyeur de faux-thon en Côte d’Ivoire. Et pour vous dire vrai, le seul Ivoirien qui a pu construire une chambre froide de plus deux mille (2000) tonnes, grâce à la politique du Président de la République, SEM Alassane Ouattara, c’est Monsieur Anoh Jérôme que je suis. Et tout se passait très bien. Et le député ASSALE le sait puisque nous nous connaissons très bien. Outre ma personne, il y a des Ivoiriens qui étaient sur d’autres bateaux. Je ne sais donc pas où il s’est renseigné.

Les chiffres donnés par Assale Tiémoko sont-ils en concordance avec les réalités du port ?

Je ne pense pas. Puisqu’en Côte d’Ivoire, en matière de thon, on avoisine deux cent soixante mille (260 000) tonnes pour tout. C’est-à-dire les usines, le produit exporté en dehors de la Côte d’Ivoire et le faux-thon qui est traité par d’autres petits mareyeurs. Et à côté de cela dire que trois personnes débarquent trois cent cinquante mille (350 000) tonnes. S’ils le font, c’est que la Côte d’Ivoire gagne gros. C’est dire aussi qu’il y a des chiffres qu’on cache. La douane doit, dans ce cas, mener des investigations pour avoir les vrais chiffres. Elle peut fouiller pour savoir s’ils ont débarqué vraiment 350 000 tonnes. Les impôts aussi peuvent fouiller pour savoir si tout a été déclaré. Mais je ne pense pas que ces chiffres soient vrais. Parce que les usines qui produisent plus ou moins 100 tonnes souvent par jour, c’est-à-dire SCODI et AIRONE produisent seulement 45 000 tonnes par an. Il dit que les armateurs ont fui la Côte d’Ivoire. Et malgré cela les trois ont 350 000 tonnes, c’est que si ces armateurs étaient sur place ce serait des millions de tonnes pour le pays. Si ces chiffres sont vrais, il faut donc que la douane et les impôts fouillent bien car ils ont beaucoup à gagner. Je suis Ivoirien, nous avons accepté nos frères venus d’autres pays. Mais j’aimerais que mon pays gagne.

Le plafonnement et la pénurie du faux-thon sur le marché.

Je vous dis que le plafonnement était une excellente décision que la Côte d’Ivoire a prise. Mais nous n’avons pas été écouté. Je pense que si l’Etat nous appelait, moi Jérôme et mon équipe et il nous écoutait, aujourd’hui on ne serait pas arrivé là. Aujourd’hui on n’allait pas arriver à ces prix sur le bateau qui, selon l’honorable Assalé Tiémoko, tourne autour de 1100 francs. Mais qu’est-ce qu’il se passe. Les usines commandent la marchandise. Quand les bateaux arrivent, AIRONE qui emploie plus de 1500 personnes, et la SCODI, un peu plus, pour un bateau de 1000 tonnes c’est dix jours de travail. Mais à cause du comportement de Momouni, quand les bateaux arrivent, une fois à bord, au lieu de laisser l’armateur vendre le poisson à 600 ou 700 francs aux usines, ils proposent d’acheter à 1000 francs. L’armateur commerçant, déclare un minimum aux usines.

Malheureusement avec ce minimum, l’usine n’arrive pas à satisfaire son tonnage commandé. C’est la raison pour laquelle, à un moment donné, AIRONE a écrit au ministère pour dire que si rien n’est fait, l’usine risquait de fermer. Le Sénégal, le Ghana et les Seychelles envoient tous leurs produits en Côte d’Ivoire. Tout simplement parce que c’est la Côte d’Ivoire qui a le produit qu’on appelle l’attiéké qui se consomme beaucoup avec le thon. Au Sénégal c’est le thon blanc qu’on prend pour faire le Tchèp. Donc quand le thon est débarqué au Sénégal qu’il n’y a pas le thon blanc ils ne savent pas quoi en faire. Et comme dans les règles de l’union européenne, il est interdit de détruire le poisson dans la mer. Il faut donc l’envoyer au pays où on consomme. Ce pays, c’est la Côte d’Ivoire. Le poisson Garba étant entré dans la liste des produits de grande consommation, il fallait assainir le secteur et le plafonnement du prix du kilogramme était une action majeure.

Les bateaux ne peuvent pas fuir le port d’Abidjan à cause du plafonnement

Quand les gens disent que le plafonnement a fait fuir les bateaux, c’est archi-faux. Les bateaux ne viennent pas en Côte d’Ivoire pour débarquer du faux-thon. Ils viennent pour les usines. Ce Kassogué Daouda et ses amis qui détournent ces bateaux à leur profit et au détriment des usines. Aussi le port d’Abidjan est le seul port qui dispose des infrastructures modernes pour les débarquements. Un bateau qui met 10 jours pour un débarquement peut prendre trois semaines, voire un mois au Ghana. Donc les armateurs ont jugé bon, pour leurs transbordements de venir au port d’Abidjan. C’est tout. Mais tant que les gens refuseront de nous écouter, ils ne sauront pas la vérité. Et j’ai mal. Parce qu’Inter Océan est la seule entreprise qui déclarait ses employés à la CNPS. Aujourd’hui tous mes employés se retrouvent au chômage technique en raison des agissements que nous avons déjà dénoncés. Mais nous sommes pour la paix et je pense que tôt ou tard l’Etat va nous écouter, nous entendre et savoir que le pays ne doit pas lui-même détruire ses propres enfants.

Chambre froide de 50 000 tonne vide au port.

Vous savez, la seule chambre froide commerciale, c’est la SOGEF où tout le monde, tous les hommes d’affaires déposent leurs marchandises, a une capacité maximum de 15 000 tonnes, pas plus que ça. Vous pouvez aller vous renseigner puisque moi-même je suis abonné depuis plusieurs années à la SOGEF. Elle a une capacité maximum de 15 000 tonnes. Donc cette chambre de 50 000 tonnes là, c’est le seul Député-Maire qui peut vous dire où elle est placée. Mais ce que je sais, c’est que les poissons surgelés, les poissons cartons, le thon et même les vivriers, l’attiéké et autres, c’est dans cette même chambre qu’on dépose. Je vous dis qu’elle a une capacité de 15 000 tonnes.

Pourquoi la SCODI n’a aucun problème d’approvisionnement ?

La société SCODI ne se plaint pas car au cours d’un atelier, son directeur général a affirmé que la SCODI a pour partenaire la Compagnie Française de Thon Océanique (CFTO), un armateur français, détenteur de plusieurs navires qui approvisionne en abondance l’usine SCODI en thon. Par contre AIRONE est en concurrence avec les mareyeurs sur les navires asiatiques

En ce qui vous concerne, est-ce parce que vous devez à l’armateur CFTO que vous avez perdu vos marchés ? Je ne dois pas à l’armateur CFTO. Vous pouvez vérifier auprès du consignataire CMB à qui j’ai fait tous mes versements.

Alors pourquoi vous ne travaillez plus sur les navires CFTO ?

Vue la concurrence déloyale entre les usines et les mareyeurs, le Président de la République SEM Alassane Ouattara a pris un décret pour plafonner le kilogramme de faux-thon à 400 fcfa. Je suis donc devenu la cible des armateurs car les frères non nationaux ont donné de fausses informations à mes fournisseurs (armateurs) que je serais à l’origine de la prise du décret de plafonnement. Du coup ceux-ci refusent de me donner leurs produits de pêche.

Recueillis par Lamine Koffi

 

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