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Côte d’Ivoire-Révision de la liste électorale-Henri Koffi N’Goran Kouassi (Pdt de l’Ong « Tolérance in world » : « La bonne formule serait de prolonger la période de révision à trois voire six mois »

Sur l’opération de révision de la liste électorale, votre ONG a été accréditée par la commission électorale indépendante (CEI) en vue de sensibiliser et d’observer la mise en œuvre de cette opération. Que dites-vous ?

L’ONG « Tolérance in world » que je dirige est née au lendemain de la crise postélectorale, précisément en 2011. Depuis 2015, l’ONG est accréditée par la CEI en ce qui concerne l’observation et la sensibilisation des élections en Côte d’Ivoire. Pour 2025, il est question de faire la révision de la liste électorale. Notre ONG a été accréditée dans la région du Gbêkê précisément à Languibonou, à Botro et à Diabo. Sur le terrain, les choses se passent très bien. Toutefois, on ne sent pas l’afflux de la population dans les centres de révision de la liste électorale. C’est notre rôle de les sensibiliser à aller se mettre sur la liste électorale. Si tu veux que ton candidat soit le président de la République en 2025, il faut que tu sois électeur. C’est ce rôle que nous jouons sur le terrain.

Quel est le retour qu’ils (vos collaborateurs) vous font ?

Le retour, qu’il n’y’a pas d’afflux. Les gens piétinent. Ils n’ont pas confiance. (…). On sent la peur au sein de la population. C’est tout ça qu’on doit essayer de pallier pour que la population soit sereine.

Parlons de la sensibilisation puisque vous avez été accrédité pour ça. En quoi consiste-t-elle ?

S’agissant de la sensibilisation, c’est d’aller vers la population. Pour ceux qui sont déjà sur la liste électorale, les amener à vérifier s’ils y sont toujours. Pour ceux qui n’ont jamais été sur la liste électorale, le cas des nouveaux majeurs ainsi que des personnes majeures, les amener à aller dans les centres d’enrôlement pour qu’ils puissent se mettre sur la liste électorale et leur expliquer le bien fondé d’être sur la liste électorale. Si tu aimes un candidat, que tu veux forcément que ce candidat soit ton président, il faut être sur la liste électorale pour pouvoir le voter. Si tu ne vas pas t’inscrire, tu auras tes yeux pour observer le candidat de quelqu’un d’autre qui va exécuter son programme. Il est important d’être sur la liste électorale. C’est le volet sensibilisation. Concernant le volet observation, nos éléments vont dans les bureaux de vote pour observer le bon déroulement et le bon fonctionnement de la révision de la liste électorale. A savoir si ça se passe selon les lois d’observation de la CEI en place ? Est-ce qu’il n’y’a pas de fraude ? Les agents font-ils leur travail ? La population est véritablement orientée pour qu’elle s’enrôle sur la liste ? C’est tout ça qui constitue l’observation de la révision de la liste électorale.

Sensibilisation et observation, les deux opérations se font-elles concomitamment ?

La sensibilisation a commencé depuis le 14 octobre dernier. Elle a pris fin le dimanche 27 octobre 2024. Quant aux observations, elles ont commencé le 19 octobre dernier. Elles prennent fin le 10 novembre prochain.

En tant qu’acteur de la société civile, quel aurait été la bonne formule ?

La bonne formule serait de prolonger la période de la révision de la liste électorale. La société civile se doit de dire la vérité. Nous sommes là pour le bien-être de la population. Ça serait intéressant de proroger à trois voire six mois pour permettre à ce que nous qui sensibilisons, on est un temps élevé et non un temps réduit pour amener la majeure partie de la population à s’inscrire sur la liste électorale. (…).

Entre les personnes déjà inscrites sur la liste et qui sont appelées à aller vérifier si leur nom y est, et ceux qui doivent s’enrôler pour la première fois, quelles sont les personnes qui trainent les pas ?

Ceux qui sont sur la liste électorale ont cette formule de pouvoir visualiser si leur nom figure sur la liste à travers internet. Vous convenez avec moi que ce n’est pas tout le monde qui maitrise l’informatique. (…). Ce sont les nouveaux majeurs qui trainent les pas. Ils ne voient pas le bien. Ce que ça va leur apporter d’être sur la liste électorale. En quoi est-ce que leur voix peut contribuer au développement de leur vie. Je tiens compte des retours sur le terrain que mes agents me font.
Les élections présidentielles de 2010 et 2020 en Côte d’Ivoire ont occasionné de nombreux morts au point où certaines personnes hésitent à s’inscrire non seulement sur la liste électorale, à participer dorénavant à un scrutin présidentiel en Côte d’Ivoire. Que dites-vous à toutes ces personnes hésitantes ?

Ces personnes ont raisons d’hésiter. Depuis la mort du premier président de la Côte d’Ivoire, le président Félix Houphouët Boigny, il n’y a jamais eu de passation en paix après une élection présidentielle en Côte d’Ivoire. Vu ce qui s’est passé en 2010 et 2020, des gens se disent que ce sera pareil. Au regard de ce que nous entendons sur le terrain, je tiens à dire aux leaders politiques notamment au président du RHDP, le président Alassane Ouattara, au président du PPA-CI, l’ancien président Laurent Gbagbo, au président du PDCI, Thiam, qu’ils pensent à la population. Tous les présidents des partis politiques doivent penser à la population. Ils doivent avoir des fonds de messages courtois. Ils doivent cultiver la tolérance. Tout le monde a peur. Il faut parler aux leaders des partis politiques, aux chefs religieux. Les leaders doivent parler à leur jeunesse. Le suivisme moutonnier ne peut rien apporter à la Côte d’Ivoire. Le Nigeria était un pays habitué aux coups d’état. Il s’est ressaisi. La Côte d’Ivoire est tellement développée qu’on ne doit pas revenir au Nigéria d’avant. On connait ce qui s’était passé au Libéria. Aujourd’hui, le Libéria organise des élections paisibles et les résultats sont connus en peu de temps. Pareil au Sénégal. Un philosophe a dit que les mots sont des pistolets chargés. Il faut qu’on désarme les mots. D’où le mot tolérance. Il faut qu’on évite 2010 bis.

Trois semaines pour la révision de la liste électorale, votre jugement ?

En tant que responsable d’une ONG qui travaille avec la CEI depuis 2015, je crois que c’est un temps qui est court. On a des prises de positions pas pour le pouvoir, pas pour l’opposition mais pour le peuple. La révision de la liste électorale se fait chaque un an. Pour atteindre l’objectif de mettre plus de 4 voire 5 millions de personnes sur la liste, il faut élargir le temps. En trois semaines, nous qui sommes sur le terrain, c’est peu. On va le signifier dans notre rapport à la CEI.

Il pleut par moment. Dans le pays profond l’accessibilité à certaines contrées est souvent très difficile. C’est la période où les paysans sont plus dans les plantations pour la culture du cacao, les travaux champêtres. Pensez-vous qu’organiser la révision électorale maintenant, en trois semaines, c’est le moment idéal ?

Il n’y’a plus de période pour maitriser la pluviométrie. C’est surtout l’état de nos routes. Certains de nos dirigeants ont failli à ce volet-là. C’est compliqué. Tout ça figurera dans notre rapport afin que la période de révision de la liste électorale soit prolongée afin que ceux qui n’ont pas pu s’inscrire à cause des incidents que vous venez d’évoquer s’inscrivent. Tout le monde a droit à s’inscrire sur la liste électorale.
Un message aux leaders politiques ?
L’ONG est née le 23 mai 2011. C’est à cette date que nous avons reçu le récépissé de dépôt. Quelques jours après l’arrestation du président Laurent Gbagbo. L’image que nous avons vu et qui a fait le tour du monde, n’est pas une image que notre père fondateur de la Côte d’Ivoire moderne, Félix Houphouët Boigny voulait. En tant que jeune Ivoirien, on a décidé d’apporter notre part. Les autorités sous le président Alassane Ouattara nous ont écoutés à travers la CEI et depuis 2015, on fait notre petite expérience avec la CEI. Nous avons fait des propositions telles que remonter les incidents de façon instantanée lorsqu’il y a des votes. Cela pour éviter des grabuges qu’on a vu en 2010-2011. (…). Nous allons en 2025. Le samedi 25 octobre 2025, on connaitra notre sort. J’attire l’attention de nos dirigeants à véritablement cultiver la tolérance.

Que pensez-vous de l’absence de l’ancien président Laurent Gbagbo sur la liste électorale ?

S’agissant de l’absence du président Laurent Gbagbo sur la liste électorale, il doit être sur la liste et il sera sur la liste. C’est un Ivoirien. Qu’on évite les intérêts du vendre. La sincérité entre les acteurs politiques. Que 2025 soit quelque chose qui va transformer la Côte d’Ivoire de façon positive. Que le perdant reconnaisse sa défaite et qu’il passe la main au gagnant. Que le gagnant soit humble et ne cherche pas à faire de la vengeance mais à faire une continuité. La Côte d’Ivoire ne se limite pas à des personnes.

Un message à la population ?

Les gens prendre d’assaut les centres de révision de la liste électorale, vérifier si on s’est déjà inscrit ou s’inscrire. Je demande à la population de ne pas avoir peur et prier pour nos leaders. Le président Bédié est parti. Pour dire qu’à tout moment ça peut être moi, l’autre. Chacun joue son rôle et il part. Il faut jouer un bon rôle.
A un an de l’élection, la campagne a déjà commencé. Il faut des mots pas blessants. Des mots d’apaisements. A la population, je dirai que ce leader qui viendra devant vous pour insulter, ne l’écouter pas. On veut des projets de société…A la société civile, d’être une véritable société civile, d’être un plaidoyer auprès du pouvoir, qui prodigue des conseils à l’opposition.

Réalisée par SAN AUBIN

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